Rue des Farges
Situation
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La rue des Farges est l’ouverture sur le quartier de Saint Just depuis le Vieux Lyon, par le Gourguillon pour les piétons ou par le chemin Neuf pour les voitures et depuis Fourvière par la rue de l’Antiquaille et la place des Minimes.
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Elle monte en pente douce vers le nord ouest et se prolonge par la rue de Trion.
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La circulation se fait dans les deux sens.
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Deux plaques donnent l'histoire des thermes et de l'église, des lions donnaient l'altitude.
Architecture
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Elle est asymétrique, en pente et en courbe.
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Le coté ouest est entièrement occupé par une résidence faite d'une enfilade d'immeubles, elle possède des balcons et plusieurs volumes. Elle est construite en retrait laissant une sorte de place garnie de buissons devant les commerces.
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Des passages sont aménagés pour donner accès à une pelouse qui domine les ruines des thermes romains.
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Le coté est débute plus bas, par trois ou quatre vieilles maisons, du 1 au 5, récemment restaurées en prolongement du Gourguillon.
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La transition est complète avec le bloc moderne du parc Saint Just rejoint par un escalier. Ce bloc masque partiellement le lycée Saint Just à l’architecture de château avec son pavillon et ses ailes massives, tout en pierres, en retrait d'une place dont les arbres assurent une belle floraison printanière.
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La partie principale est composée par deux alignements de maisons anciennes et sobres, de part et d'autre de l'église. Ils sont un peu disparates avec de belles arches et encadrements autour des fenêtres des commerces. Le 39, plus massif et plus récent a été récemment repeint à la Génoise en soulignant les fenêtres, avec le 41, ses flancs dessinent la place de l'église avec deux belles portes, le 39 par son bois, le 41 par son encadrement qui répondent à l'harmonie des trois de l'église.
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La rue se termine par la maison de retraite des années 1960, construite en retrait à l’angle de la place Larue. Elle a été remplacée par une résidence étudiante à bandes jaunes avec un pan coupé pour relier la rue et la place.
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Cet alignement est ponctué d’une impasse pittoresque et fleurie au 43 qui dessert quelques maisons et dans laquelle on peut voir une pierre romaine gravée de latin.
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L’autre élément remarquable est l’église de Saint Just, placée en retrait d’une charmante petite place. Elle possède un fronton baroque, avec, de part et d’autres les statues de Saint Irénée et de Saint Just. Ce sont surtout les vitraux de 1880 qui sont beaux ainsi que tous les portraits des évêques enterrés sous l’autre église Saint Just, sculptés dans l’église.
Dédicace
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Le nom viendrait d'une déformation des Forges. Ce nom est très ancien puisque la porte des Farges ouvrait les remparts du bourg épiscopal de Saint Just, fief des ecclésiastiques pendant le moyen âge. Maurice Vanario indique que le nom est attesté en 1380.
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Il y avait plusieurs forgerons à la porte de Lyon, ils ferraient chevaux et chariots des voyageurs arrivant à Lyon.
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Il ne faut pas confondre avec Yves Farge ou le comte de Fargues, détenteurs chacun d’une rue.
Histoire
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C’est ici que se trouvaient les thermes de Lugdunum, ces thermes remontent au premier siècle. On peut en voir les vestiges derrière la grande résidence qui occupe les numéros pairs. En face, sous l’actuel lycée Saint Just, les romains conservaient leur eau dans la citerne Bérelle, toujours existante.
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Le temple de Mytra, pendant secret du culte à Cybèle se serait caché ici.
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La rue des Farges a existé pendant 250 ans à Lugdunum avant d’être abandonnée au 3e siècle comme toute la colline.
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Le quartier de Saint Just a été réoccupé au 11e siècle, la rue des Farges y menait et se terminait sur la porte de Saint Just. C’est la raison pour laquelle les forgerons ont dû s’y installer pour ferrer les chevaux et réparer les voitures des voyageurs. Cette rue faisait le lien entre le Gourguillon lyonnais et le bourg fortifié de Saint Just. Joannès Drevet en a réalisé quelques belles gravures.
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En 1269, les Lyonnais utilisèrent la recluserie de la Madeleine, située en dessous de la rue des Farges pour assiéger les chanoines de Lyon qui avaient abandonné le cloître saint Jean pour se réfugier au cloître saint Just. On peut voir les vestiges des fondations de l’église rue des Macchabées et un reste de muraille place Wernert. C’est lors de ces émeutes que l’on a entendu les Lyonnais marcher en poussant le cri qui est devenu la devise de la ville : avant, avant Lion le melhor. Le 14 septembre 1270, une délégation armée de la ville a donné l’assaut pour la troisième fois de l’année au bourg de Saint Just dans lequel les chanoines de l’archevêché étaient réfugiés depuis un an. C’est le roi de France Philippe de Hardi qui a réussi à faire signer un accord en août 1271 à son retour d’Afrique.
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Cette rue a été barrée par des portes successives du moyen âge au début du 20e siècle. En 1310, il y avait un pont levis qui défendait la porte de Saint Just. Le 5 avril 1418, le consulat a fait creuser un profond fossé entre la porte de Saint Just et la porte des Forges avec un pont de bois dessus pour défendre la ville. La nuit de la Saint Mathieu 1420, Bachelard a été foudroyé alors qu’il faisait le guet sur la porte des Forges. Blessé, il a été dédommagé par la ville. En 1421, on a construit une maison pour loger les gardes de la porte des Forges.
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Le 18 septembre 1585, le quartier de Saint Just a été intégré à la ville de Lyon.
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L’église de Saint Just est l’héritière de celle qui a été rasée par les troupes du baron des Adrets en 1562, elle est porteuse de confusion par son déménagement et par la dédicace aux sept frères macchabées qui orne son fronton : Machabaeis Primo deinde Sanctus Iusto, d’abord aux Macchabées, ensuite à Saint Just. Elle a été construite de 1591 à 1662, en finissant par la façade de Ferdinand Delamonce en 1704. Elle est dédiée au saint qui a donné son nom à tout le quartier. Saint Just fut évêque de Lyon de 374 à 381, il est connu pour avoir participé au concile de Arles.
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Il a démissionné pour devenir ermite en Egypte. Il ne se sentait plus digne de son sacerdoce pour n’être pas parvenu à éviter le lynchage d’un homme qui avait cherché refuge dans son église. Comme les Lyonnais y étaient attachés, ils envoyèrent une délégation en Egypte pour aller le chercher. Malheureusement, la délégation arriva après sa mort et ne put ramener que son corps, enterré rue des Macchabées dans une chapelle funéraire, remplacée par la seconde plus belle église de Lyon au fil du temps et de la progression du culte de Saint Just. Généralement, les églises sont rebâties sur l’endroit même des premières constructions, Saint Just fait exception à la règle, les troubles de l’histoire et la destruction menée par le baron des Adrets ayant fait disparaître toute construction au premier emplacement.
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Le lycée de Saint Just, d'abord grand séminaire a été construit à l’emplacement d’un monastère des Ursulines arrivées ici en 1633.
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Balthazard Jean Baron, né à Lyon en 1788 a vécu au 47 jusqu'à sa mort en 1869. Il s'est illustré comme graveur. La bibliothèque lui a consacré une exposition et un catalogue en 1999.
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Lors de la seconde révolte des canuts en 1834, le toit de l’église saint Just fut l’un des derniers points de résistance des insurgés.
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Le haut de la rue a été fermé par une porte de la fortification de Lyon de 1850 à 1924. On peut voir sa photo et un historique sur le site de la bibliothèque.
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Rogatien le Nail a mené des fouilles de 1908 à 1912 qui ont fait connaître des vestiges romains.
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Le séminaire universitaire a enseigné de 1897 à 1933 au n°39Ter.
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L'architecte Jean Cateland a vécu au 39, il a travaillé avec Tony Garnier. On doit le premier gratte ciel de Lyon à son père Emmanuel, son grand père était déjà architecte. Son fils Yves et son petit fils Bruno ont été architectes après lui.
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Louis Aguettant, né à Lyon en 1871 a vécu au 39 jusqu'à sa mort en 1931, il était professeur de lettres à la faculté catholique, on lui doit des ouvrages sur la littérature et la musique, dont la musique de piano des origines à Ravel.
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En 1974, tout le côté pair de la rue fut écroulé dans le but de faire une opération immobilière. De belles maisons du 15e et 16e siècle trop délabrées pour faire pitié furent abattues avec une grosse boule suspendue à une grue. La construction fut entreprise avec célérité sans réaliser aucune fouille. Une association attaqua le promoteur et quelques années après, le chantier reprit et l’immeuble moderne fut écroulé. La SEL, Sauvegarde et Embellissement de Lyon, fondée à cette occasion est toujours active en 2024.
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La fouille put enfin avoir lieu découvrant rien moins que les thermes de Lugdunum. Le promoteur put reconstruire à nouveau vers 1980 mais en laissant plusieurs passages aux piétons qui voudraient aller admirer les restes des thermes romains. Ceci explique l’architecture quelque peu ajourée des bâtiments actuels. A cette occasion, la rue des Farges a pris une nouvelle largeur. Un livre, les fouilles de la rue des Farges à Lyon relate cet épisode et surtout montre les découvertes de façon très détaillée.
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Depuis, la place devant le lycée a été refaite à l'occasion de la construction des annexes, en 2024, la toiture a été rénovée en utilisant des tuiles Doyet Edilians comme illustré dans l'article de batinfo. La résidence étudiante a été construite en 2015, tout le reste est resté stable.
Art et associations
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La vie associative est riche dans la rue des Farges.
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L’association culturelle des sanctuaires Saint Irénée et Saint Just propose des visites de l’église Saint Just. Cette association propose aussi des conférences sur l’histoire du quartier. En 2023, j'ai vu un site dédié à la collégiale Saint Just. L’aumônerie des lycées est installée ici. La paroisse catholique s’est recentrée sur l’église Saint Irénée, aussi, c’est la sacristie orthodoxe qui est plus active dans l’église. Benjamin Biolay y a enregistré son disque à l'origine.
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Au 31, le centre social propose des activités et services variés dont une bibliothèque et une halte garderie.
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Au 41, l’association des familles œuvre pour la paix dans une ambiance internationale.
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Au 47, la MJC de Saint Just s’affiche par la galerie 47.
Commerces et services
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Les forges et les auberges de la porte de Saint Just ont disparu depuis longtemps.
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C’est ici que se trouve le lycée Saint Just, en 1944, Danielle Gouze, ensuite épouse Mitterrand y a passé un an en pensionnat pour préparer le bac. A Cluny, avec ses parents, elle avait hébergé le futur président non loin de Solutré, et les responsables de Combat, Henri Frenay et Bertie Albrecht.
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Cinq snacks avec de petites terrasses sur le trottoir vivent de la proximité du lycée, de même qu’un atelier de reprographie.
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Il y a deux architectes, un restaurateur de meubles, un serrurier.
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Un garage auto et une auto école.
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Cinq médecins dont plusieurs psychothérapeutes et deux coiffeurs ainsi que sept sociétés.
Juin 2005, octobre 2011 et décembre 2024
Dernière mise à jour :
Auteur : Franck